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Chronique d’un nouveau-né aux mains de débutants

Une sage-femme reprend la recette du film «Allô maman, ici bébé», à savoir, le faire parler. Objectif: expliquer aux jeunes parents ce qu’ils devraient savoir

Il y a trois jours, j’ai ouvert les yeux sur ce nouveau monde, si différent de mon aquarium et inspiré ma première bouffée d’oxygène. Quel tapage! Toutes ces clameurs, ce fracas d’instruments métalliques qui s’entrechoquent, ces portes qui claquent. Vivement la maison!

Sitôt arrivé, maman m’a couché dans mon berceau. Aïe! Que le matelas était dur! Pourtant, j’avais entendu grand-maman vanter les vertus des matelas en son en proposant de rafraîchir le berceau de famille. Mais maman a répondu que la vendeuse lui avait soutenu le contraire et que plus dur c’était, mieux c’était pour mon dos. On voit qu’elle l’a pas essayé, ce matelas! Et puis, à la maternité, on m’a surélevé pour que je ne régurgite pas mon lait et là, à plat, j’ai tout le temps de l’acidité qui remonte. Que c’est désagréable!
–CREDIT–
En plus, qu’est ce qu’on gèle dans cette pièce! A l’hôpital, j’avais une bouillotte et un petit duvet. Ici, je grelotte! J’ai grandi dans un microclimat tropical. Ils l’ont oublié ou quoi? Maintenant que j’y repense, la sage-femme leur a recommandé, en partant, de ne pas dépasser 19° dans ma chambre, à cause de la mort subite! Et toujours cette rengaine de boîte à musique qui finit par m’empêcher de m’endormir. Mais qu’est ce que j’étais mieux logé avant, bercé par les battements du cœur de maman!

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Lorsque la sage-femme est venue nous visiter, j’ai compris que mes conditions de vie allaient s’améliorer. Elle a commencé par dire à maman que j’avais besoin d’un nid douillet et que c’était mieux de me coucher dans quelque chose de moelleux et de plus petit, pour m’habituer progressivement aux duretés de ce monde. Ah, enfin, quelqu’un qui me comprend!

Elle a aussi dit que mes pieds étaient mon baromètre. C’est vrai que s’ils sont froids, j’ai froid partout. Ils ont promis de me réchauffer avec des petits chaussons ou une bouillotte. La sage-femme leur a ensuite expliqué qu’il ne fallait pas me laisser hurler pendant les premiers mois de ma vie. Merci! Quand j’ai des émotions, elles sortent toutes seules. Je ne contrôle rien du tout. J’ai particulièrement aimé quand elle a dit à maman qu’elle pouvait répondre à tous mes besoins sans culpabiliser!

Ensuite, maman lui a dit que je n’aimais pas le bain. Et pour cause! Elle le fait couler à 37°. Le temps qu’elle me déshabille, il a déjà refroidi. La sage-femme lui a montré un truc et maintenant, je crois que j’aime bien l’eau: elle m’a plongé dans un vrai bain chaud et m’a laissé gigoter en me racontant des tas d’histoires. Avant de me sortir, elle a encore rajouté un peu d’eau chaude puis m’a emmailloté dans un linge chaud. Quel bien-être! Et pendant que maman me rhabillait, la sage-femme a tenu le sèche-cheveux près de moi pour que je ne me refroidisse pas. Un vrai petit air de vacances, déjà qu’avec ma légère jaunisse, on me dit que j’ai le teint bronzé! J’étais si détendu que maman a pu faire mes soins en chantonnant. Et elle m’a même parfumé. Depuis ce jour, à la maison, c’est le cinq étoiles!

Lila Sonderman, Les joyeuses tribulations d’une sage-femme, Editions Favre

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