Skip to content

Un Dieu tout en relation

Avec La Cabane, Paul Young a signé le best-seller spirituel de la décennie. Rencontre avec l’auteur, en tournée en Europe
Joël Reymond

C’est l’histoire d’un père de famille qui s’est essayé à l’écriture. Pour ses enfants. Quelques années plus tard, le Canadien Paul Young est non seulement connu et à l’abri financièrement, mais on le compare déjà à John Bunyan, l’auteur du Voyage du Pèlerin, l’allégorie chrétienne peut-être la plus connue de l’époque moderne. Pas mal pour un amateur, qui vivait jusque-là de petits boulots, avoue revenir de loin dans la vie et a commencé par publier son travail en quinze exemplaires. «Une blague cosmique de Dieu», nous confie-t-il.

Un livre dans l’ère du temps
La Cabane plaît. Ce livre rencontre manifestement une attente. C’est le récit initiatique et spirituel qu’on peut donner à sa voisine les yeux fermés, tant Paul Young a empoigné la question de Dieu en même temps que celle du mal, avec finesse et inventivité, tout en restant complètement sur le terrain relationnel. Ajoutez à cela un parfum de controverse qui a sans doute contribué à ce succès d’édition : Dieu sous les traits de plusieurs personnages, dont une ample femme africaine qui s’appelle «Papa» ? Un Dieu qui se laisse approcher et même enguirlander, aux antipodes du maître sévère, distant et imperturbable ? Au-delà de la thérapie qu’il administre au personnage principal, Mack, le Dieu décrit par Paul Young a mis mal à l’aise un certain nombre de chrétiens, comme de nombreux médias généralistes, toujours frileux face à de tels ouvrages. Paul Young s’en frotte les mains. «Je comprends la réaction des gens. Mais la controverse ne me fait pas peur. Elle vaut mieux que l’indifférence !», déclare-t-il. Sa théologie, défend-il, est correcte. «J’ai écrit ce livre dans la perspective des Pères de l’Eglise. Pour eux, Dieu est relation et c’est tout», plaide-t-il. «Alors que nous, enfants du siècle des Lumières, avons un Dieu de dogmes et d’équations.»

Publicité

La thérapie de l’authenticité
Ce qui est frappant, c’est la manière dont l’auteur emmène ses lecteurs dans l’introspection, ce qu’il assure ne pas avoir visé. «Rappelez-vous, j’écris pour mes enfants !», me dit-il, reconnaissant cependant la démarche de mise à nu qui a été la sienne : «D’étaler les questions de mon cœur au travers de la vie de Mack, c’est une porte ouverte devant les lecteurs. Quand vous ouvrez le cœur humain, vous lancez un processus. Les gens se positionnent». Ce choix de la transparence, le sexagénaire canadien l’assume et le vit. «D’être capable de dire, “voilà ma vie, elle est ce qu’elle est, désordonnée, basée sur l’égoïsme et mes stratégies de survie”, n’a pas été facile dans mon parcours mais ça a été incroyablement libérateur ! Oui, je suis arrivé à un point où je n’ai plus de secret pour personne.»
Mack, le «double» de Paul Young dans le récit, ne se remet pas de la mort de sa fille aux mains d’un serial killer. L’auteur n’a pas vécu ce drame, mais il explique avoir puisé dans ses souffrances personnelles – le deuil d’un frère adolescent, son enfance volée aux mains d’un abuseur sexuel – et aussi dans son amour pour ses propres enfants : «Aucun parent sain d’esprit ne donnerait pas sa vie pour son enfant. C’est inscrit en nous et il y a là l’image la plus proche de la manière dont Dieu nous aime. D’entrer dans le scénario de la Cabane n’était pas pour moi un grand pas», conclut-il.

Joël Reymond

SpirituElles

Article tiré du numéro SpirituElles 4-10 – Décembre-Février

Thèmes liés:

Publicité