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Ils se battent contre les abus

© Alliance Presse
Jorge et Martha ont les larmes aux yeux... et les mains liées. Pourtant, ce couple pastoral d’une Eglise évangélique de Duran, une des banlieues pauvres de Guayaquil, la plus grande ville d’Equateur, n’a pas froid aux yeux.
Christian Willi

Le 27 décembre 2009, ils ont franchi une étape importante dans la lutte engagée contre les pratiques d’abus sexuels à Duran. Ils ont remis les premiers «diplômes» aux couples qui ont suivi une formation à la parentalité. L’événement a été marqué d’une pierre blanche, de façon très officielle.

La promiscuité en cause
Leur centre d’accueil d’enfants est partenaire de l’ONG Compassion. Installé dans une des pièces, ils racontent ce qui les a poussés à lancer ce cours. Au contact de plus de trois cents enfants qu’ils accueillent pour des activités extrascolaires (atelier d’artisanat, cours de cuisine, d’hygiène et de santé et animation biblique), ils ont détecté des cas d’abus sexuels et vu les dégâts sur les enfants innocents.
Dans les alentours de l’Eglise, la densité de la population par habitat est très élevée. En raison de la précarité économique, il est fréquent que plusieurs générations, oncles, tantes, cousins et cousines partagent le même toit. Et c’est souvent là que les abus se produisent.

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Autorités corrompues
Le couple pastoral s’est dans un premier temps tourné vers la police à laquelle il a dénoncé les abus. Mais dans la plupart des cas, les proches prenaient la défense du «prédateur» et celui-ci retrouvait sa liberté. Quant aux dénonciateurs, ils ont reçu des menaces. Certaines ont même été mises à exécution. Une mère a porté plainte contre son beau-frère qui vivait sous son toit. Non seulement, cet homme a été relâché, mais la mère de famille a été assassinée par son propre mari. Quant à la fillette, qui fréquente le centre d’accueil, elle vit toujours avec un oncle indigne et un père meurtrier. Une autre fillette est abusée par son frère avec la bénédiction de son père.
Ces sévices, certaines filles devenues adultes les paient «cash». Une bénévole du centre d’accueil de l’Eglise a été rejetée et mise à la porte dès l’instant où son mari a appris qu’elle avait été violée dans sa jeunesse.

Changement de stratégie
Depuis, Jorge et Martha ont reculé et changé de stratégie. Finies les dénonciations contre-productives. Le couple pastoral s’est résolu à accueillir, à accompagner et à soutenir ces pauvres victimes. Le plus dur, nous confient-ils, c’est de laisser partir ces enfants en fin de journée dans la gueule du loup.
«Nous croyons que si nous voulons que le climat de notre ville change, nous devons enseigner des valeurs familiales et spirituelles», explique Martha. C’est désormais sur ce terrain qu’ils livrent la bataille. Avec un matériel pédagogique créé de toutes pièces, ils forment une première volée de parents. Leur enseignement porte sur l’estime de soi, le respect de l’autre, la sexualité et la guérison des blessures. Le rêve de Jorge et Martha, c’est qu’une nouvelle génération de parents brise le cercle infernal. ❤

Par Christian Willi

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